Contrôle d'identité

C'était une longue file de badauds, bondée mais paisible, qui s'étirait ce jour-là devant l'entrée de la guérite, toisée par la garde, effectuant sa monotone besogne.

Soudain, le calme apparent de la foule fut chamboulé par un élément invisible : la populace, agglutinée là, était bousculée, comme si un animal sauvage se frayait un passage au travers des hautes fougères. Puis, l'attention du garde fut attirée par une odeur, plutôt familière selon lui car venant de ses pieds, mais plus forte que d'habitude néanmoins.

- « Qui va là ! Identifiez-vous ! » hurla-t-il, par réflexe, en me découvrant tout près de lui. Ou par habitude ...
Une voix caverneuse raisonna...
- « Quelle monstruosi...animosité ! » n'ai-je pu laisser échapper de ma barbe.
« Je me nomme Mayburn Durendeal ! Quoi, t'sais pas qui j'suis, l'garde ? »,
lui répondis-je vulgairement, en voyant son air éberlué, tentant ainsi d'utiliser le même champ lexical que mon interlocuteur pour essayer de me faire comprendre.

Après quelques secondes d'un silence gênant, je n'arrivais toujours pas à savoir si c'était la pauvreté de son éducation, ou le fait qu'il n'ait pas l'habitude de croiser des Nains, qui l'avait figé sur place, les yeux écarquillés, pupilles dilatées  

« T'inquiète, t'apprendras à me connaître bien assez tôt : je sens déjà le regard de ton supérieur peser tellement fort sur ton plan de carrière, que lorsque tu te retourneras et croiseras son visage aigri, tu tomberas d'un étage et tu partageras le même point de vue que moi, en règle générale, mais toi, tu seras à genoux. Maintenant, laisse nous parler entre grandes personnes : il sait que je suis forgeron, ingénieur, et connaît la valeur de mon savoir-faire ».

Après quelques clignements d'yeux, comme pour digérer le flux d'informations diverses que son esprit n'avait pas l'habitude de traiter, il s'écarta. Sans doute car il avait vu dans mes bagages dépasser quelques bouteilles et autres tonnelets, mais aussi pour me laisser faire face à son chef, qui fini de l'écarter en le poussant du bras, comme pour affirmer son autorité, et mes dires.

Je savais que la boisson était la meilleure des diplomates ... Et que mes compétences finiraient d’appuyer mon autorisation de passage, les gens comme moi ne couraient pas les chemins ...